Publié le 04.08.2023
Inquiétudes après l’annulation de La Plage des Six Pompes
La Plage des Six Pompes, La Chaux-de-Fonds
Devenue en trente ans d’existence une place essentielle pour les arts de rue, La Plage des Six Pompes s’est vue annulée à quelques jours du lancement de son édition 2023 suite aux intempéries survenues la semaine passée à La Chaux-de-Fonds. Rencontre avec son directeur, Hugues Houmard, inquiet pour l’avenir de ce festival désormais quasiment patrimonial.

Hugues Houmard, quand, comment et pourquoi la ville de La Chaux-de-Fonds a-t-elle décidé d’annuler l’édition 2023 de La Plage des Six Pompes ?
Au moment de la tempête du 24 juillet à La Chaux-de-Fonds, les infrastructures de La Plage avaient commencé à être montées. Nous avions une quarantaine de personnes sur le terrain, qui ont juste eu le temps de se protéger. Après le moment de violence, on a commencé à faire le point. Nous avons arrêté les travaux et fait une première analyse. Heureusement, il n’y avait aucun dégât humain et très peu de dégâts matériels de notre côté. Nous avons rapidement eu contact avec les autorités. Le mardi, on nous a dit que ce ne serait pas possible pour le premier week-end. Le festival étant prévu du samedi 29 juillet au dimanche 6 août, on sauvait tout de même la majorité des choses. D’où notre première annonce, qui prévoyait un retour soit le 1er soit le 2 août. Le lendemain, les autorités nous ont dit très rapidement que la situation, après analyse sur le terrain, était plus grave que prévue. Ils ne voyaient pas comment faire venir des milliers de personnes à La Chaux-de-Fonds. La décision nous a été annoncée mercredi à midi sans retour en arrière possible.
Quelles différences y avait-il entre cette annulation et celle de 2020 consécutive à l’épidémie de COVID ?
La grosse différence, c’est que cette année, c’était trois jours avant le festival, alors que pour le COVID, la décision avait été prise au mois d’avril pour le mois de juillet. On était dans une autre dynamique, beaucoup de frais et de préparations de La Plage n’avaient pas encore été engagés. Là, on était prêts à commencer, les artistes avaient été invités et signés et tous nos prestataires avaient presque fourni leurs prestations en entier. A part l’état de fait, c’est-à-dire l’annulation, les contextes et les raisons sont extrêmement différents.
Peut-on actuellement quantifier le coût de cette annulation ?
Ce qui est quantifiable, ce sont tous les revenus qu’on attendait du festival. Notre première ressource financière, c’est la vente de boisson et de nourriture. Ça, c’est une perte sèche. Maintenant, ce qui n’est pas encore tout à fait quantifiable, ce sont les prestations finales qu’on devra payer. Ça se compte en centaine de milliers de francs. A hauteur de combien, il est encore impossible de le dire après tout juste une semaine. Nous allons entrer en discussion avec nos fournisseurs et partenaires. Tous nos partenaires financeurs ne se sont pas positionnés, notamment au niveau des subventions qu’on devra peut-être rembourser étant donné que l’événement n’a pas eu lieu. C’est donc compliqué à dire, mais on parle de centaine de milliers de francs à l’heure actuelle.
Au-delà des artistes, que représente un festival comme celui-ci en termes de ressources humaines ?
Le staff comptait cette année entre 450 et 500 personnes. A l’année, ce sont huit personnes qui préparent déjà le festival durant 14 mois. Il y a encore une dizaine de personnes en CDD, on a une dizaine de régisseurs, c’est donc une assez grosse machine qui s’est arrêtée net. Au niveau programmation, nous avions prévu 54 compagnies qui sont payées au chapeau. C’est aussi clairement une perte sèche pour laquelle, pour l’instant, nous n’avons pas de solution. Nous allons voir avec les autorités si une indemnisation est possible.

La Dérivée à Yverdon a proposé de reprendre en dernière minute certains spectacles prévus à La Plage. En quoi ce soutien vous a-t-il soulagé ?
Cela s’inscrit dans un projet que l’on a en parallèle du festival depuis maintenant cinq ans, le Six Pompes Summer Tour qui présente tout l’été des spectacles d’arts de rue dont nous prenons en charge la programmation en collaboration avec diverses collectivités. Dans ce cadre, la commune d’Yverdon-les-Bains nous a contactés pour savoir s’il n’était pas possible d’organiser des étapes supplémentaires que l’on a appelées «de soutien» à la Dérivée et sur les terrasses de la ville. Nous avons donc proposé cela à six compagnies qui étaient en Suisse et qui venaient de relativement loin, parce qu’elles jouaient dans d’autres étapes du Six Pompes Summer Tour ou qu’elles étaient prévues dans d’autres festivals.
Y a-t-il aujourd’hui un risque pour la survie du festival ?
Il y a un risque. Tout dépendra du soutien des collectivités. Nous avons quelques réserves, mais elles ne sont pas à hauteur de centaine de milliers de francs de pertes de revenus. Sans le soutien des collectivité et d’autres fonds, ce sera compliqué. En étant positif, je dirais qu’on devrait s’en sortir, mais je pense que le principal danger aujourd’hui, c’est pour l’édition de l’année prochaine. Toute l’énergie que l’on va mettre ces prochains mois à sauver le festival ne sera pas remise dans l’édition suivante. Nous n’avons malheureusement pas les ressources pour mener de front ces deux missions. Ne pas pouvoir travailler à 100 % sur l’édition prochaine est une inquiétude pour le moment.
L’Association des Amis de la Plage lance un appel aux dons suite à l’annulation du festival.
Le Six Pompes Summer Tour quant à lui, poursuit sa route en Suisse Romande durant tout l’été.