Publié le 25.07.2023

Haute-tension et haute-voltige, le festival Hautes Fréquence nous fait vibrer

Hautes Fréquences, Leysin

Entouré par les pics escarpés des Alpes Vaudoises, et embrassé par le soleil d’été, c’est à Leysin qu’a lieu le festival Hautes-Fréquences, une expérience alternative dans un milieu idyllique. Découverte de la programmation d’un après-midi de leur 9ème édition.

J’arrive accueillie par un son Folk Rock qui semble venir d’un autre temps, c’est la fin du DJ set de Cosmic Sid, qui ouvre ce samedi la deuxième journée du festival Hautes-Fréquences. Le public de jeunes adultes a dormi sur place au camping, et les premiers concerts de l’après-midi y ont lieu directement et sont gratuits.

PussyR, tout en ambiance

Les effets déforment le son du lapsteel et de la guitare jusqu’à ne plus les reconnaître, les deux musiciennes tapent alors des percussions douces sur les cordes, créant un son ambiant répétitif et enveloppant. En fermant les yeux, on peut se laisser transporter vers de distantes contrées grâce aux harmonies étranges et flottantes se formant petit à petit comme tant d’affluents qui se rejoignent en une rivière au lent courant. Il ne faut pas attendre de morceau de la part de PussyR, mais plutôt donner sa main pour se faire guider en profondeur dans leur toile sonore aux nombreux détails.

Lorraine92, les souvenirs sur cassette

© Nikita Thévoz – Lorraine92 et ses synthétiseurs vintages font rêver le camping du Hautes-Fréquences
© Nikita Thévoz – Lorraine92 et ses synthétiseurs vintages font rêver le camping du Hautes-Fréquences

Derrière les synthétiseurs vintages et la réverbération sur la voix, Lorraine92 nous donne l’impression d’écouter une cassette audio dans un vieux lecteur. Cette douce nostalgie se transmet dans ses mélodies à l’arpégiateur, ses accompagnements évocateurs au clavier, et sa voix maîtrisée, toute en retenue.

Ses « chansons sur fond bleu », elle nous les donne en souriant, et on ne peut pas s’empêcher de sourire en retour, mis face à cette jeune représentante d’une ancienne époque, qui semble trouver sans effort comment créer des nappes aux sons riches et chargés d’émotions et de souvenirs. Avec une guitare plus vieille qu’elle, qu’elle prend pour nous jouer Fever Dream, les effets nous donnent l’impression que le son sort directement d’une bande magnétique.

Je découvre après le concert qu’elle vend ses chansons sur de véritables cassettes, probablement la manière la plus authentique d’écouter cette musique venant pourtant de notre décennie. C’est un vrai coup de cœur pour moi.

Roshâni, une vraie musique du monde

Un trio énergique composé d’une guitariste-chanteuse, une synthésiste, et un batteur. Pour ce premier concert dans l’enceinte du festival, Roshâni met l’ambiance avec une Dance électronique aux tons orientaux. Roshâni signifiant « Lumière » en farsi, le groupe aux racines perses nous annonce « On va vous emmener à Téhéran ! » avant d’entonner un morceau au rythme endiablé. Chantant en espagnol, en français, et en farsi, c’est un vrai tour du monde que nous fait faire Roshâni. Formé seulement début 2023, c’est pourtant un groupe complètement confirmé auquel on a à faire, et c’est sur les mélodies d’un synthétiseur qui sonne parfois comme un bandonéon qu’on se sent pouvoir danser jusqu’à la fin de la nuit.

Fiesta En El Vacio, une poésie sombre

© Nikita Thévoz – La musique sombre de Fiesta En El Vacio sur la petite scène du festival
© Nikita Thévoz – La musique sombre de Fiesta En El Vacio sur la petite scène du festival

Les concerts s’enchaînent sur les deux scènes qui donnent sur la place du festival. Fiesta En El Vacio nous accueille pour le suivant, c’est une seule musicienne, accompagnée de sa guitare classique et de son Tascam, qui démarre un set sur des sons ténébreux et distants. La Drum Machine mécanique supporte sobrement la voix triste de l’artiste, qui nous chante en envolées sombres des poésies intangibles en espagnol. Quand elle prend sa guitare après quelques morceaux, alors sa voix n’est plus la seule à chanter pleine de mélancolie.

Derya Yıldırım & Grup Şimşek, un renouveau sur les traditions

© Nikita Thévoz – Derya Yıldırım et sa bağlama (au centre) enflamme le festival avec Grup Şimşek
© Nikita Thévoz – Derya Yıldırım et sa bağlama (au centre) enflamme le festival avec Grup Şimşek

Derya Yıldırım démarre sur les chapeaux de roues en démontrant sa virtuosité à la bağlama, un instrument à cordes traditionnel d’origine turque, ici agrémenté une fois encore de nombreux effets. Accompagnée par Grup Şimşek - une batteuse, un bassiste, et un synthésiste - elle présente une musique tantôt ballade, tantôt rock, mais toujours psychédélique.

Le groupe qui se définit comme « outernational » (ses membres provenant de Turquie, d'Afrique du Sud, d’Allemagne, et de France) se sent à la maison dans les Alpes, annoncent-ils sur scène avant de se lancer dans un rock psyché en cinq temps. En effet, ils ont enregistré tous leurs albums à Chambéry. Le bassiste nous surprend soudain en entonnant un solo de flûte traversière à vitesse grand V, nous montrant que le nom de Derya Yıldırım a beau être à part, c’est bien tout le groupe qui est d’une précision magique. A coups de rythmes syncopés et de chants traditionnels, leurs morceaux entraînants nous font bouger alors que le soleil se couche.

Un succès retentissant

C’est une programmation soignée que nous présente Hautes-Fréquences cette année, avec des prestations de haut vol très variées, mais qui tournent toutes de près ou de loin autour de la musique électronique. 

Je me dois de saluer également la mixité des groupes. Là où beaucoup d’autres festivals romands voient leur programmation dominée par les hommes, Hautes-Fréquences qui se revendique comme festival inclusif tient sa promesse en ayant un beau mélange de genre, un festival rempli de femmes talentueuses qui n’ont rien à prouver.

C’est un vrai succès, j’attendrai de pied ferme la prochaine édition !